Josianne Beaud, le Lyon-Turin, et les implications pour la région franco-suisse [AG Alprail 2022]
Une AG sur un futur européen
C'est avec son énergie et sa clarté habituelle que Josianne Beaud, Chef de la délégation française de la Commission intergouvernementale du Lyon Turin, a fait sa présentation à l'Assemblée générale Alprail 2022 le 19 décembre à Aix-les-Bains. Alprail l'a invité en raison des implications qu'aura ce grand projet pour les décennies à venir, depuis la Provence jusqu'au Piémont en passant par la Suisse.
Le Lyon-Turin est positionné sur un des axes européens de trafic marchandise : le corridor méditéranéen, s'étirant depuis Lisbonne à l'extrême Ouest jusqu'à Kiev à l'extrême Est. Sur cet axe, le projet de tunnel entre la France et l'Italie est né suite à la signature en 1991 de la Convention des Alpes, qui est une Convention internationale visant à protéger les Alpes et qui a été signée par l'ensemble des pays alpins. Plus précisément, le "tunnel de base international" doit permettre un transfert modal massif des marchandises de la route vers le rail: "Sur cet axe, seuls 9% des marchandises sont transportées par le rail actuellement" explique-t-elle, "alors qu'en Suisse, le trafic transalpin est fait à 74% sur le rail." En poursuivant cette politique de transfert, l'espace alpin sera significativement mieux protégés des nuisances et de la pollution provenant du trafic de transit, et les émissions de CO2 seront massivement réduite. Le percement du tunnel international a débuté l'année dernière, en 2021, et il devrait être terminé d'ici 2034.
Josianne Beaud raconte comment, dès les années 90, un conflit entre trafic marchandise et voyageur est apparu, avec l'idée du "tunnel de l'Épine", appendice devant intégrer Chambéry au futur réseau voyageur. "Mais il faut commencer avec le tunnel de Chartreuse à destination des marchandises auparavant, sinon il serait aberrant de faire passer tout le trafic - toutes les marchandises - à travers Chambéry, et de bloquer les voyageurs utilisant la ligne au quotidien : garder à l'esprit que le projet est avant tout pour les marchandises, et le trafic voyageur, c'est la cerise sur le gâteau." En effet, la ligne historique Lyon-Chambéry-Modane profitera du délestage, favorable au trafic local. Par ailleurs, le projet connexe "CFAL" (Contournement ferroviaire de Lyon) entre Ambérieu-en-Bugey et Vénissieux sera la nouvelle voie d'accès pour le fret en direction de l'Italie. "Il est intimement lié au Lyon-Turin."
Le perception suisse
Le public - majoritairement suisse - trouve dans les propos de Mme. Beaud rapidement les implications qui le concerne directement. "Le CFAL sera également essentiel pour le trafic de la Suisse en direction du Sud de la France" ajoute Pascal Vuichard, représentant de l'ATE Genève (Association Transport et Environnement). "Genève et la Suisse doivent se préparer à l'ouverture du tunnel en 2034, et trouver le moyen d'obtenir une connexion directe avec Turin" abonde Tobias Imobersteg, Président d'Alprail.
Ancien Président du Grand Conseil genevois, Gabriel Barrillier demande à Josianne Beaud quel est l'état d'avancement des voies d'accès, notamment les tunnels de Chartreuse et de Belledonne. "Rien", il y a encore beaucoup de travail à faire répond-elle. En citant le Gothard, M. Barrillier fait remarquer que "les voies d’accès sont aussi importantes que le tunnel lui-même, il y a encore du pain sur la planche".
Image : TELT, Josianne Beaud